Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 1, 1839.djvu/343

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se retrouvent les différents personnages de notre histoire. Lady Marianne, comtesse de Pendennyss, devint grosse une seconde fois ; mais en donnant le jour à une fille, sa santé reçut une atteinte dont elle ne se remit jamais parfaitement. Ses nerfs devinrent très-sensibles ; elle perdit presque toute son énergie, et la moindre commotion pouvait lui être funeste. Son mari était sa seule consolation ; il était aux petits soins avec elle ; et la vue des souffrances de Marianne semblait avoir encore augmenté la tendresse qu’il lui avait toujours témoignée.

Yves n’avait point oublié que c’était à la noble conduite de M. Denbigh qu’il devait son bonheur, et Isabelle se rappelait avec la plus vive reconnaissance le généreux dévouement qu’il avait montré en s’expatriant pour assurer le bonheur de celle qu’il aimait. Le Ciel l’avait récompensé de ce sacrifice héroïque, et Marianne s’était chargée d’acquitter la dette qu’Isabelle avait contractée avec lui.

La plus grande intimité s’était établie entre les deux ménages, et comme le jeune Yves était assez riche pour ne pas attendre après un bénéfice, il accepta volontiers l’offre que lui fit M. Denbigh de venir remplir les fonctions de chapelain dans son château, jusqu’à ce qu’il se présentait quelque cure avantageuse. Yves et Isabelle habitèrent pendant six ans Pendennyss-Castle. Le ministre de la paroisse était vieux et infirme, et il n’avait pas voulu qu’on lui donnât de vicaire ; mais les services de M. Yves, qui le soulageait dans ses pénibles fonctions sans chercher à s’en faire aucun mérite, n’étaient pas moins agréables au pasteur qu’à ses paroissiens.

Occupé à chaque instant à remplir des devoirs qui regardaient de droit le titulaire, et qu’il fallait concilier avec ceux que lui imposait son titre de chapelain du château, notre jeune ministre menait une vie aussi active que s’il eût desservi la cure la plus étendue. Isabelle et lui passaient toute l’année dans le pays de Galles ; ils ne formaient qu’une seule famille avec M. Denbigh et lady Pendennyss, qui ne les quittaient jamais que pour aller passer l’hiver à Londres, et qui alors laissaient leur fils avec eux. Ce fut à leurs tendres soins que le petit George dut les premières semences de vertu qui se développèrent ensuite dans son âme ; le jeune ministre, qui avait aussi le bonheur d’être père, se faisait un plaisir de lui donner les mêmes leçons qu’à Francis.