Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 10, 1839.djvu/105

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son beau visage, qu’on aurait pu penser qu’il avait été ainsi favorisé de la nature, afin de faire triompher plus facilement la déception. S’il y avait des moments où l’on voyait dans ses manières le mépris de l’opinion, c’était plutôt un sentiment affecté que naturel, et même, lorsque dans son entrevue avec l’alderman, il avait montré son indifférence aux lois qui règlent la société, elle avait été mêlée d’une réserve de manières qui contrastait étrangement avec son humeur.

D’un autre côté, il est inutile de dire qu’Alida de Barberie n’avait aucun soupçon désagréable sur le caractère de l’étranger. La funeste influence qui s’exerce nécessairement près d’un pouvoir qui n’est pas responsable, jointe à l’indifférence naturelle avec laquelle les chefs considèrent leurs dépendants, avait porté le ministère anglais à faire remplir trop de postes honorables et avantageux, dans les colonies, par des hommes de rang, sans talents et de mœurs dissolues, ou par ceux qui avaient de puissantes protections en Angleterre. La province de New-York avait sous ce rapport été plus malheureuse qu’une autre. Le don qu’en fit Charles à son frère et successeur l’avait privée de la protection de ces chartes et autres privilèges qui avaient été accordés à la plupart des gouvernements d’Amérique. Les relations avec la couronne étaient directes, et, pendant une longue période, la majorité des habitants fut considérée comme une race différente, et par conséquent une race inférieure à celle des conquérants.

Tel était à cette époque le relâchement de la justice envers les peuples de notre hémisphère, que les déprédations de Drake et autres, contre les riches habitants des contrées plus au sud, ne paraissent pas avoir laissé aucune tache sur leurs écussons, et les honneurs ainsi que la faveur de la reine Élisabeth s’étaient étendus sur des hommes qui seraient, de nos jours, appelés flibustiers. Enfin, le système de violence et de morale spécieuse qui commença avec les donations octroyées à Ferdinand et Isabelle par les bulles des papes, fut continué avec plus ou moins de modifications, jusqu’à ce que les descendants de ces hommes simples d’esprit et vertueux qui peuplaient les États-Unis, prirent entre leurs mains les rênes du gouvernement, et proclamèrent des principes politiques aussi peu pratiqués auparavant qu’ils étaient peu compris.

Alida savait que le comte de Bellamont et le seigneur sans principes que nous avons introduits dans les premières pages de notre