Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 10, 1839.djvu/140

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aussitôt qu’il eut cessé de parler. Le nègre regarda cette retraite comme un augure favorable pour celui que chacun savait être son rival, et il se hâta d’aller informer le jeune capitaine que la côte était libre.

L’entrevue qui succéda eut quelque chose de contraint et de gauche. L’alderman van Beverout prit un air d’autorité offensée, d’affection blessée, tandis que l’officier de la reine paraissait se soumettre à un devoir qui n’avait rien d’agréable. Les phrases préliminaires furent en conséquence cérémonieuses, et on observa de part et d’autre toutes les formes de politesse en usage.

— Il est de mon devoir, continua Ludlow, lorsque ces phrases préparatoires furent débitées, d’exprimer la surprise que je ressens en voyant un vaisseau d’une apparence aussi équivoque que ce brigantin, qui est à l’ancre dans le Cove, dans un lieu qui pourrait élever des soupçons désagréables sur les relations commerciales d’un négociant aussi connu que monsieur l’alderman van Beverout.

— Le crédit de Myndert van Beverout est trop bien établi, capitaine Cornélius Ludlow, pour souffrir de la position accidentelle des vaisseaux et des haies. Je vois deux bâtiments à l’ancre près du Lust-in-Rust, et si j’étais appelé en témoignage devant le conseil de la reine, je dirais que celui qui porte son royal pavillon a fait plus de tort à ses sujets que l’étranger. De quoi accuse-t-on ce dernier ?

— Je ne cacherai aucun des faits, car je sens que c’est un cas où un homme de votre condition peut faire valoir avec raison tous les droits qu’il a de s’expliquer…

— Hem ! interrompit le bourgeois, qui n’aimait pas la manière dont son compagnon avait ouvert l’entretien, et qui voyait le commencement d’un compromis forcé, dans le tour que la conversation allait prendre. Hem ! J’admire votre modération, capitaine Ludlow. Nous sommes flattés, Monsieur, de voir un homme né dans la province appelé à un commandement aussi honorable sur la côte. Asseyez-vous, je vous prie, que nous puissions causer plus à loisir. Les Ludlow sont une ancienne famille honorablement établie dans les colonies, et, quoiqu’ils ne fussent pas amis du roi Charles… nous en avons d’autres ici qui sont dans le même cas. Il y a peu de têtes couronnées en Europe qui ne pourraient découvrir quelques-uns de leurs sujets dans ces colonies, et