Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 10, 1839.djvu/178

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entendre d’un lieu secret quoique peu éloigné, et qui causèrent sous quelques rapports du plaisir et de la surprise au jeune capitaine et au patron. Leur compagnon avait ses motifs pour être insensible à la même émotion.

Après une courte et vive symphonie, un instrument à vent joua un air étrange, tandis qu’une voix humaine chantait des paroles qui étaient tellement couvertes par l’accompagnement, qu’il était impossible d’en distinguer quelque chose, sinon que c’était le mystérieux enchantement de quelque divinité de l’Océan.

— Chants et flûtes ! murmure Myndert lorsque les sons furent évanouis, voilà du véritable paganisme, et un honnête commerçant, qui fait ses affaires sur terre, a de bonnes raisons pour désirer d’être à l’église. Qu’avons-nous affaire avec les sorcières de terre et d’eau, ou toute autre sorcellerie, que nous restons sur ce brigantin maintenant qu’il est certain que ma nièce n’y est pas ? et de plus, en admettant que nous ayons l’intention de faire un commerce quelconque, ce bâtiment ne contient aucune marchandise dont un homme du Manhattan puisse avoir besoin. La boue la plus épaisse de ton manoir, patron, est une terre où l’on peut marcher plus sûrement que sur le pont d’un vaisseau dont la réputation est si mauvaise

Les scènes dont il était témoin produisaient un puissant effet sur van Staats de Kinderhook. D’une imagination lente, mais d’une force colossale, il n’était pas facilement excité soit à donner carrière à son imagination, soit à éprouver quelque crainte personnelle. Quelques années s’étaient seulement écoulées, depuis que des hommes éclairés sous d’autres rapports ajoutaient foi à l’existence d’agents surnaturels qui étendaient leur pouvoir sur les affaires de cette vie ; et bien que les nouveaux Hollandais eussent échappé à cette contagion qui s’était si généralement répandue dans les provinces religieuses de la Nouvelle-Angleterre, une crédule superstition, moins active il est vrai, possédait l’esprit des colons hollandais les plus distingués, et même possède encore de nos jours leurs descendants. L’art de la divination était particulièrement en faveur, et il arrivait rarement qu’un événement inattendu affectât la fortune ou le bonheur des bons provinciaux, sans qu’ils s’en fissent expliquer la cause par un des devins les plus en renommée dans le pays. Les hommes dont les facultés sont peu actives aiment les émotions fortes, parce qu’ils