Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 14, 1839.djvu/87

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nable, de sorte que je me suis servi du dictionnaire du schooner, comme d’une espèce d’almanach terrestre ; et comme ils me parlaient chacun leur jargon, je leur ai rendu la monnaie de leur pièce, espérant que je pourrais par hasard tomber sur quelque chose qui leur convînt. Par ce moyen je suis devenu plus verbeux que de coutume.

— L’idée était heureuse.

— Sans doute elle l’était, et la preuve c’est que me voici. Mais à présent que je vous ai rendu compte de moi et de mes occupations, il est temps que je vous fasse quelques questions à mon tour. C’est une marchandise dont nous trafiquons beaucoup à Stonington, comme vous devez le savoir ; et l’on convient généralement que nous ne nous y entendons pas mal.

— Faites-moi vos questions, capitaine Poke ; j’espère que j’y répondrai d’une manière satisfaisante.

— Votre nom ?

— John Goldencalf, — par la bonté de Sa Majesté, sir John Goldencalf, baronnet.

— Sir John Goldencalf, par la bonté de Sa Majesté, baronnet ! Baronnet est-il un métier ? Quelle est cette espèce de chose ou de créature ?

— C’est le rang que j’occupe dans le royaume auquel j’appartiens.

— Je commence à vous comprendre. Dans votre pays, les hommes sont stationnés comme l’équipage d’un navire, et tandis que les autres ont des hamacs, vous avez votre cabane, comme j’avais la mienne à bord de mon schooner.

— Précisément ; et je présume que vous conviendrez que l’ordre, les convenances et la sécurité sont le résultat de cette méthode adoptée par les marins.

— Sans doute, sans doute. — Cependant nous changeons les stations à chaque voyage, suivant l’expérience que nous avons acquise. Si nous prenions un homme pour cuisinier, par exemple, uniquement parce que son père l’aurait été avant lui, cela nous ferait de belle bouillie pour les chats.

Ici le capitaine commença une série de questions avec tant de vigueur et de persévérance, qu’il tira de moi successivement toutes les circonstances de ma vie, à l’exception de mon amour pour Anna, sentiment trop sacré pour que mes lèvres le trahis-