Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 16, 1839.djvu/118

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encore quelques minutes, et furent bien récompensés de leurs peines par une vue qui, par son caractère et sa beauté, égalait presque celles de la Suisse.

— C’est à présent que je sais où nous sommes, s’écria Ève en battant des mains avec transport ; car je vois là-bas notre heureuse demeure.

Tout le mystère fut alors expliqué, et ceux pour qui cette vue était nouvelle n’auraient voulu pour rien au monde avoir manqué une manière si piquante de faire connaissance avec la vallée du Susquehannah.

Pour que le lecteur puisse comprendre quelle était la cause du plaisir qu’éprouvaient tous nos voyageurs, et savoir pourquoi John Effingham leur avait ménagé cette surprise, nous nous arrêterons un moment pour faire une courte description des objets qui s’offraient alors à leurs yeux. Ils étaient à l’extrémité de la forêt et sur le bord d’une montagne escarpée. Les arbres les entouraient de tous côtés, excepté en face, où se présentait à eux le panorama, quoique les cimes de grands pins qui croissaient sur le flanc de la montagne fussent presque en ligne parallèle avec leurs yeux.

En face, et à plusieurs centaines de pieds au-dessous d’eux, un beau lac, entouré d’arbres et de montagnes, s’étendait à plusieurs lieues sur la droite. Du côté le plus proche des voyageurs, une frange de forêt interceptait la vue de l’eau ; et de l’autre, la vue était bornée par des hauteurs couvertes de fermes, et coupées çà et là par des bouquets de bois, de manière que le tout ressemblait à un vaste parc. On voyait de belles vallées entre ces hauteurs, et de jolies maisons s’élevaient partout dans les champs. La teinte sombre des arbres verts qui croissaient sur toutes les hauteurs voisines de l’eau faisait un beau contraste avec le vert plus vif des feuilles des autres arbres, tandis que des prés et des pâturages offraient une verdure qui égalait celle de l’Angleterre et de la Suisse. De petits caps et des baies ajoutaient à la beauté exquise du lac limpide, et l’une de ces baies s’avançait au nord-ouest de manière que l’œil doutait s’il voyait ou non la fin de cette nappe d’eau transparente. Vers le sud, des montagnes plus élevées et de formes variées bornaient aussi la vue ; mais elles étaient cultivées, et présentaient aux yeux les fruits du travail de l’homme, quoique coupées en beaucoup d’endroits par de petits bois, qui, comme nous l’avons déjà dit, donnaient à tout ce can-