Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 16, 1839.djvu/121

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les principaux traits du paysage, tous les yeux s’y fixèrent comme sur un foyer d’intérêt. Un assez long silence prouva que ce sentiment était général, et après que ce bâtiment eut attiré leurs regards, ils s’assirent sur des souches et sur des arbres tombés, sans prononcer une seule syllabe. Aristobule fut le seul qui permit à ses yeux de se promener de côté et d’autre ; mais il examinait surtout avec curiosité la physionomie de M. Effingham, près de qui il était assis, pour tâcher de découvrir si ses traits exprimaient ou non l’approbation des fruits du génie de son cousin.

— M. John Effingham a considérablement régénéré, revivifié et transfiguré le vieux bâtiment, dit-il enfin, en ayant la précaution de se servir de termes qui laissaient dans le doute ce qu’il pensait lui-même de ces changements. Les travaux qu’il a ordonnés ont fait parler dans tout le comté, ils ont été le sujet de presque toutes les conversations, et ils ont même causé quelque agitation.

— Comme cette maison me vient de mon père, dit M. Effingham, sur les traits doux et calmes duquel un sourire se glissait peu à peu, j’en connaissais l’histoire, et quand on me demandait l’explication des singularités qu’elle offrait, je les attribuais à l’ordre composite ; mais vous, John, vous avez remplacé tout cela par un style qui vous appartient, et dont je serai forcé de demander l’explication à de plus hautes autorités.

— Mon goût ne vous plaît-il pas, Édouard ? À mes yeux, ce bâtiment, vu d’ici, ne paraît pas mal.

— Il est indispensable, en architecture, de consulter avant tout les convenances et les aises domestiques, pour me servir de votre propre argument, John. Êtes-vous bien sûr, par exemple, que ce toit en terrasse convienne parfaitement aux neiges qui tombent fréquemment dans ces montagnes, et qui s’accumulent à une telle hauteur ?

John se mit à siffler et chercha à prendre un air d’insouciance, car il savait fort bien que le premier hiver avait démontré que ce toit ne convenait nullement au climat. Il avait même envie de le faire changer à ses propres frais ; mais indépendamment de ce qu’il savait que son cousin trouverait mauvais qu’un autre que lui payât une partie des changements faits à sa maison, il lui répugnait d’avouer en face de tout le pays qu’il avait commis une bévue dans un art qu’il se piquait de connaître presque aussi bien que son illustre prédécesseur, M. Richard Jones.