Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 16, 1839.djvu/137

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— Je suis fâchée de l’apprendre, monsieur Bragg ; car, professant moi-même la religion épiscopale, et ayant une grande confiance en l’antiquité et la pureté de cette Église, je regretterais beaucoup de la voir supplantée par une autre.

— Je crains pourtant que nous ne devions lui céder le pas sur ce point ; car à cet égard ces presbytériens l’ont véritablement emporté sur les épiscopaux.

— Et sur quel point l’ont-ils emporté d’une manière si signalée ?

— Quoi ! Miss ! leur nouvelle cloche pèse cent livres de plus que celle du nouveau Saint-Paul, et le son s’en fait entendre bien plus loin. Je sais fort bien que cet avantage ne leur servira de rien au jour du dernier compte ; mais cela fait une grande différence dans cet état d’épreuve. — Vous voyez cette grande maison jaunâtre, entourée d’un mur élevé et surmontée d’un beffroi ? Dans son caractère régulier, c’est la cour de justice et la prison du comté ; mais en matière de religion, elle sert indifféremment à tous.

— Voulez-vous dire que les personnes de toutes les religions y sont jugées, ou qu’on y professe tous les cultes ?

— C’est cela même, Miss ; car je crois qu’elle a servi à toutes les nuances de religion, à l’exception des juifs. Cette tour en bois, peinte, appartient aux universalistes ; et cet édifice grec, qui n’est pas encore peint, aux anabaptistes. Les quakers, je crois, se réunissent dans leurs maisons, et les différentes nuances de presbytériens en font autant.

— Y a-t-il donc des nuances de croyance dans la même secte, et cela dans une population si peu nombreuse ? demanda Ève avec une véritable surprise.

— Nous sommes dans un pays libre, Miss, et la liberté aime la variété. Plus il y a d’hommes, plus il y a d’opinions.

— Cela est vrai, Monsieur, dit Paul ; mais ici il paraît y avoir beaucoup d’opinions et peu d’hommes. Ce n’est pas tout encore d’après ce que vous dites vous-même, quelques-uns ne savent même pas bien précisément quelle est leur opinion. Mais pouvez-vous nous dire quels points essentiels sont compris dans ces nuances d’opinion ?

— Il faudrait toute la vie d’un homme pour en comprendre la moitié, Monsieur. Les uns disent que l’enthousiasme est la religion, et d’autres que c’est le contentement. Ceux-ci veulent la