Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 16, 1839.djvu/153

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population. Dans quelques endroits, l’âge pastoral ou celui de la bonne intelligence dure toute une vie, ce qui fait peut-être rétrograder les habitants sous le rapport de quelques-unes des plus nobles qualités, mais ce qui les rend plus heureux en ce qui concerne les plaisirs du moment ; dans d’autres, elle s’écoule rapidement comme les joies vives de la race humaine entre quatorze et vingt ans.

La seconde période est ordinairement de plus longue durée, les habitudes de migration du peuple américain retardant l’organisation de la société plus longtemps que cela n’arriverait dans tout autre cas. On peut dire qu’elle ne se termine entièrement que lorsque la grande majorité de la génération existante est née dans le nouvel établissement, et ne connaît d’autres objets de comparaison que ceux près desquels elle a passé sa vie. Et même quand cela arrive, il s’y trouve souvent un si grand nombre d’oiseaux de passage, — d’hommes qui sont des aventuriers cherchant à s’avancer et qui vivent sans connaître les bons rapports de voisinage, comme on peut dire qu’ils vivent sans domicile, — qu’il s’y trouve longtemps un état mixte de société pendant lequel on peut mettre en doute si une communauté appartient à la seconde ou à la troisième période.

Templeton était exactement alors dans cette situation équivoque car, quoique la troisième génération des premiers colons fût déjà dans l’âge mûr, tant d’étrangers allaient et venaient, que leur influence neutralisait presque celle du temps et de l’ordre naturel des choses. La population était à peu près également partagée entre les descendants des premiers habitants et des gens qu’on pouvait regarder comme les hirondelles et les autres oiseaux de passage. Tous ceux qui étaient arrivés dans ce canton dans la force de l’âge, et dont les travaux avaient fait du désert l’habitation d’hommes civilisés, s’ils n’avaient pas été littéralement placés dans la tombe de leurs pères, avaient été les premiers chacun de leur race ensevelis dans la terre qui devait couvrir un si grand nombre de leurs descendants. Il restait encore quelques-uns de ceux qui étaient arrivés jeunes dans le désert ; mais les événements de la première période, que nous avons imparfaitement rapportés dans un autre ouvrage[1], n’étaient déjà plus que des traditions. Ces premiers colons conservaient encore une partie

  1. Dans les Pionniers.