Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 16, 1839.djvu/237

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tillon de la marine me donnera une meilleure idée des maîtres et des contre-maîtres, des Trinculo et des Stéphano, pour tout le reste de ma vie.

— Ne parlez pas des Trinculo et des Stéphano, ma chère mistress Bloomfield ; car, à l’exception des samedis soirs, quand il porte le toast « des maîtresses et des femmes, » il n’existe pas un homme plus exemplaire que notre excellent ami le capitaine Truck. Il a trop de religion et de moralité pour avoir un vice aussi vulgaire que celui de la boisson.

— De religion ! s’écria mistress Bloomfield avec surprise. C’est un mérite auquel je ne savais pas qu’il eût le moindre droit. J’aurais pu lui supposer quelque superstition, quelques courts accès de repentir pendant une tempête, mais rien qui fût régulier en fait de religion comme les vents alisés.

— Vous ne le connaissez donc pas ; car on trouve rarement un homme plus sincèrement religieux, quoique je convienne que c’est d’une manière qui est peut-être particulière à l’Océan. Quoi qu’il en soit, il est rempli d’attentions pour les dames.

— L’essence de la politesse. Pour ne rien embellir, il y a en lui un air de déférence mâle qui est agréable à la vanité de notre sexe. C’est sans doute une habitude de paquebot, et nous devons vous remercier de quelque partie de ce mérite. Sa langue ne se lasse jamais de faire votre éloge, et si je n’étais bien convaincue que vous n’épouserez jamais un républicain américain, je craindrais excessivement les suites de sa visite ici. Quoique je vous aie dit que j’étais aussi dans ses bonnes grâces, la balance n’est incertaine qu’entre mistress Hawker et vous. Je sais que vous n’avez pas coutume de plaisanter sur ce sujet inépuisable de conversation pour les jeunes personnes, — le mariage ; mais ce cas forme une exception si complète, que je me flatte que vous excuserez mon indiscrétion. Notre capitaine doré, car il n’est pas cuivré, proteste que mistress Hawker est la plus charmante vieille dame qu’il ait jamais vue, et que miss Effingham est la plus charmante jeune personne qu’il ait jamais connue. Chacune de vous peut donc voir le terrain qu’elle occupe, et jouer ses cartes en conséquence. J’espère que vous me pardonnerez de toucher à un sujet si délicat.

— Je voudrais d’abord entendre la réponse de mistress Hawker, dit Ève.

— Tout ce que j’ai à dire, répondit cette dame d’un ton de plai-