Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 16, 1839.djvu/354

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terie et à l’affectation du sien, et trop attachée à Paul pour être sérieusement mécontente, elle baisa la main de son père, secoua la tête en souriant, et se leva pour sonner, comme il lui avait dit de le faire.

— D’après tout cela, mon père, il est devenu important pour nous de mieux connaître tout ce qui concerne M. Powis, dit-elle en se rasseyant, et je voudrais que les choses n’eussent pas marché si vite.

— Tout ce que j’ai promis est conditionnel et dépend de vous-même. Si vous trouvez que j’aie été trop loin, vous pouvez refuser de ratifier le traité que j’ai négocié.

— Vous me proposez ce qui est impossible, répondit Ève en lui prenant une main qu’elle pressa entre les siennes. Le négociateur est trop respecté, a trop de justes droits pour ordonner, et jouit de trop de confiance pour être désavoué ainsi. Je ratifierai, je ratifie, mon père, tout ce que vous avez promis, tout ce que vous pouvez promettre en mon nom.

— Quand même j’annulerais le traité, ma chère Ève ?

— Même en ce cas. Je n’épouserai personne sans votre consentement, et j’ai une confiance si entière en votre affection pour moi que je n’hésite pas à dire que je n’épouserai jamais que celui que vous me destinerez.

— Que le ciel vous bénisse, ma chère fille dit M. Effingham ; je crois tout ce que vous me dites, car je vous ai toujours vue la même depuis que la réflexion a pu diriger vos actions. Priez M. John Effingham de venir ici, dit-il à un domestique qui se présenta à la porte. Et je crois, ajouta-t-il à sa fille, que vous continuerez à être la même jusqu’au dernier de vos jours.

— Mais vous oubliez, mon pauvre père, que vous avez vous-même servi d’instrument pour transférer à un autre mon obéissance et mes devoirs. Si ce monstre marin devenait un tyran, s’il levait le masque et qu’il se montrât sous ses traits naturels, êtes-vous préparé à me prêcher l’obéissance ? — Et en parlant ainsi, Ève, le cœur plein de son bonheur, avait les bras passés autour du cou de son père qu’elle comblait de caresses presque enfantines.

— Assez, assez, ma chère Ève ; je reconnais le pas de notre cousin ; il faut qu’il nous trouve dans une humeur un peu plus sérieuse.

Ève se leva ; et quand John entra, elle lui offrit la main