Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 16, 1839.djvu/405

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en avoir une double assurance. Je me flatte qu’il n’arrivera jamais rien qui m’oblige à me séparer de vous, Madame ?

— Jamais, du moins de mon consentement, ma bonne Nanny. Et à présent qu’Annette va se marier, vos services me deviendront doublement nécessaires.

— Et mamerzelle, Madame ? demanda Nanny les yeux étincelants de plaisir. À présent que vous savez tout, et que vous n’avez plus besoin d’elle, je suppose qu’elle va retourner dans son pays ?

— Mademoiselle Viefville retournera en France au commencement de l’automne mais ce sera avec nous tous ; car mon père, mon cousin John, mon mari, — Ève rougit un peu en prononçant ce mot, encore nouveau pour elle, — moi, et vous aussi, Nanny, nous mettrons à la voile pour l’Angleterre dans la première semaine d’octobre avec sir George et lady Templemore, et nous irons ensuite en Italie.

— Peu m’importe où j’irai, miss Ève, pourvu que je sois avec vous. J’avoue que je préférerais ne pas vivre dans un pays où je ne puis entendre tout ce qu’on vous dit ; mais partout où vous serez, ce sera pour moi le paradis terrestre.

Ève embrassa encore une fois la bonne femme, et Annette arrivant en ce moment, elle changea de costume.

En se rendant dans le salon, les deux cousines se rencontrèrent sur le palier du grand escalier. Ève était un peu en avant, mais elle fit place à Grace, et lui dit en souriant et en lui faisant une grande révérence :

— Il ne me convient point de prendre le pas sur lady Templemore, moi qui ne suis que mistress Paul Effingham.

— Je n’ai pas l’esprit aussi faible que vous vous l’imaginez ma chère Ève. Croyez-vous que je ne l’aurais pas épousé s’il n’avait pas été baronnet ?

— Templemore, ma chère cousine, est un homme que toute femme peut aimer ; et je crois aussi fermement que je l’espère qu’il vous rendra heureuse.

— Et cependant, Ève, il y a une femme qui n’a pas voulu l’aimer !

Ève fixa les yeux sur sa cousine et tressaillit un instant ; mais elle fut satisfaite de la conduite de sir George, car la franchise de son aveu était une garantie de sa bonne foi et de sa sincérité. Elle prit la main de sa cousine avec affection, et lui répondit :