Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 18, 1841.djvu/443

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de connaître son excellent cœur, de ne pas le placer bien au-dessus de tous les autres ? demanda Mercédès.

— Qualités guerrières, — excellent cœur ! répéta lentement la reine ; et faire si peu d’attention au mal qu’il cause ! Luis n’est ni un chevalier ni un cavalier digne de l’estime de notre sexe, si ce que vous supposez est vrai, ma chère enfant.

— Señora, répondit avec vivacité Mercédès, dont la méfiance cédait au désir qu’elle avait de justifier notre héros, la princesse nous a raconté de quelle manière don Luis l’a délivrée de son plus grand ennemi, de son persécuteur, d’un tyran nommé Caonabo, souverain d’une partie de son île, et avec quel dévouement il a combattu pour elle.

— Retirez-vous, ma fille, et après avoir prié la sainte Vierge Marie d’intercéder pour vous, cherchez sur votre oreiller le calme que procure une religieuse soumission à la volonté de Dieu. — Béatrix, je désire rester seule avec la princesse.

La marquise et Mercédès se retirèrent, laissant Isabelle et Ozéma seules dans l’appartement. L’entrevue qui suivit dura plus d’une heure, ce temps ayant été nécessaire à la reine pour se former une opinions sur les réponses de l’étrangère, dont les moyens de communication étaient encore très-imparfaits. Qu’ozéma eût donné sans réserve son cœur à Luis, c’est ce dont Isabelle ne put douter en aucune manière. Habituée à ne déguiser aucune de ses pensées, la jeune Indienne n’aurait pu réussir à lui cacher la préférence qu’elle accordait à Luis, quand bien même elle en aurait eu le projet ; d’ailleurs, indépendamment de son ingénuité naturelle, Ozéma pensait que son devoir exigeait qu’elle ne cachât rien à la souveraine de Luis, et elle lui ouvrit son cœur avec autant de simplicité que de franchise.

— Princesse, lui dit la reine lorsqu’elle se crut enfin en état de saisir les paroles de la jeune Indienne, maintenant je crois comprendre votre récit. Caonabo est chef, ou, si vous le voulez, roi d’un pays voisin du vôtre. Il a désiré vous épouser ; mais comme il était déjà marié à plusieurs princesses, vous avez, avec beaucoup de raison, refusé ses offres. Il essaye alors de s’emparer de vous par la force, et le comte de Llera se trouvant en visite chez votre frère…

— Luis ! — Luis ! s’écria Ozéma, sa voix douce exprimant quelque impatience ; Luis ! — non comte. — Luis ! — Luis !

— Fort bien, princesse ; mais le comte de Llera et Luis de Bo-