Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 24, 1846.djvu/130

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Les yeux des deux sœurs se rencontrèrent et toutes deux rougirent, tandis que chacune se représentait l’image de celui qui occupait toutes ses pensées : mais elles gardèrent le silence, et peu de temps après firent leur prière.

Le lendemain, Evert Beekman et Beulah Willoughby furent mariés. La cérémonie se fit aussitôt après le déjeuner dans la petite chapelle. Il n’y eut de présents que les parents et Michel O’Hearn, que ses fonctions de sacristain empêchaient de prier avec les assistants, ce qui tranquillisait sa conscience. L’honnête Irlandais avait été mis dans le secret à la pointe du jour ; et après avoir balayé le temple, il avait revêtu son habit des dimanches, en l’honneur de la circonstance.

Une mère aussi tendre que mistress Willoughby ne pouvait pas renoncer à ses droits sur son enfant, sans répandre des larmes. Maud aussi pleura, mais ce c’était pas autant par sympathie pour Beulah que pour une tout autre cause. Le mariage, du reste, fut simple et sans aucune manifestation de grands sentiments. C’était une de ces unions raisonnantes qui promettent d’être heureuses. Il y avait entre les deux jeunes gens parfaite conformité de rang, de fortune, d’âge et d’habitudes. Rien ne choquait les principes reçus dans ce prudent assemblage. Evert était aussi digne de Beulah, qu’elle était digne de lui. Il y avait sécurité dans l’avenir de chaque côté, et pas un doute ni une crainte ne se mêlèrent aux regrets, si l’on peut appeler regrets les pensées en quelque sorte inséparables d’une cérémonie si solennelle.

Le mariage était fait ; le bon père et la tendre mère avaient pressé sur leurs cœurs la jeune mariée qui souriait à travers ses larmes ; Maud l’avait étreinte dans un affectueux embrassement, et le chapelain avait réclamé son baiser, quand se présenta l’honnête sacristain.

— Moi aussi, je viens avec vos amis souhaiter tout le bien possible à vous, à votre mari, à vos enfants, à tous ceux enfin qui vivaient avant vous, et à tous ceux qui vivront après. Je vous ai connue quand vous étiez toute petite, il y a bien des années de cela, et je n’ai jamais vu une expression fâcheuse sur votre joli visage. Je me proposais depuis longtemps de vous dire ces paroles. J’en désire autant pour miss Maud. Oh ! n’est-elle pas charmante aussi. C’est dommage qu’il n’y ait pas là quelque joli garçon pour