Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 24, 1846.djvu/41

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heur, et elles ne peuvent être mieux en sûreté que sous les yeux de leur père.

— Je ne parle pas pour moi, Hughes ; mais, je vous en prie, n’oubliez pas de faire placer les barrières avant que nos filles ne viennent.

— Tout sera fait ainsi que vous le désirez, ma bien-aimée quoique ce soit une rude besogne de suspendre à leurs gonds ces deux massives pièces de bois. Il nous faudra choisir un jour où tous nos hommes seront disponibles. Lundi prochain, j’ai l’intention de passer une revue, et une fois par mois il y aura réunion générale, pour nettoyer et charger les armes, et donner les instructions nécessaires en cas d’alarme. Un vieux soldat ne voudrait pas s’exposer à être surpris par des vagabonds. Mon amour-propre est en jeu, et vous pouvez dormir en paix.

— C’est bien, mon cher Hughes, je suis tranquille.

Alors madame Willoughby continua de visiter les chambres, en exprimant sa satisfaction des soins qu’on avait pris pour son bien-être et pour l’embellissement de sa demeure.

L’intérieur de la maison présentait ces singuliers rapprochements entre la civilisation et les premiers essais de la vie sauvage, que l’on rencontre si fréquemment sur les frontières américaines. Des tapis en Amérique, et dans l’an de grâce 1765, n’étaient pas un article indispensable dans un ameublement ; on en trouvait cependant, quoiqu’ils ne couvrissent guère que le centre de la chambre. Un de ces accessoires si essentiels dans un climat froid, était étendu sur le carreau du salon de madame Willoughy, qui servait en même temps de salle à manger. Les chaises, quoique massives, étaient élégantes, et l’on pouvait se mirer dans le brillant acajou des tables. Des bureaux, des secrétaires, des buffets, et autres articles semblables, avaient été transportés à la hutte sur des traîneaux et par les voies navigables. La mode n’était pas beaucoup consultée à cette époque de simplicité, où le fils n’hésitait pas à porter même les habits de son père, bien des années après qu’ils étaient sortis des mains du tailleur. Les vieux meubles massifs duraient pendant plusieurs générations, et madame Willoughby voyait plusieurs articles, qui avaient appartenu à son grand-père, réunis sous le premier toit qu’elle pût considérer comme à elle.

Elle termina son inspection par les offices. Là, elle trouva déjà installés les deux Pline ; Marie, la sœur de Pline-l’Ancien ; Bessy,