Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 27, 1847.djvu/178

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ment ce qu’on appelle en philosophie les droits élémentaires, ce qui veut dire droit aux éléments, dont le principal est la terre. En effet, s’il n’y avait pas de terre pour nous tenir dessus, nous tomberions de l’air, nous perdrions notre eau en vapeur, nous ne pourrions l’employer à nos moulins et à nos manufactures ; et où placerions-nous nos feux ? La terre est donc le premier droit élémentaire, et constitue le premier et le plus sacré droit aux éléments.

« Je ne méprise pas non plus entièrement l’ancienneté ; non, je respecte les droits de première acquisition ; car ils fortifient et soutiennent le droit aux éléments. Mais si les ancêtres de ce Littlepage ont payé quelque chose pour la terre, à votre place, concitoyens, je serais généreux, et je lui en rendrais le prix. Peut-être ses agents ont-ils payé au roi un cent[1] par acre, peut-être deux ; mettons même si vous voulez six pence. Je lui fermerai la bouche en lui donnant les six pence par acre. Non, je ne suis pas ennemi des mesures généreuses.

« Mes concitoyens, je déclare que je suis ce qu’on appelle un démocrate, et je veux donner une esquisse de mes principes, afin que chacun voie pourquoi ils ne peuvent s’accorder avec l’aristocratie ou la noblesse, sous quelque forme que ce soit. Je crois qu’un homme en vaut un autre sous tous les rapports. Ni la naissance, ni la loi ni l’éducation, ni la richesse, ni la pauvreté, ni rien, ne peut altérer ce principe qui est sacré, fondamental, qui est la clef de voûte de la démocratie. Tout homme en vaut un autre, dis-je, et a juste les mêmes droits qu’un autre à la jouissance de la terre et de ses priviléges. Je crois que la majorité doit décider en toutes choses, et que c’est le devoir de la minorité de se soumettre. Mais on m’a fait dans quelques endroits cette objection : — En ce cas, la minorité ne vaut pas la majorité, et n’a pas les mêmes droits. — La réponse à cet argument est si simple, que je m’étonne qu’un homme de sens ait pu l’invoquer : la minorité n’a qu’une chose à faire, c’est de se joindre à la majorité, et alors toutes choses seront égales. La voie est ouverte, et c’est ce qui fait la vraie liberté. Tout homme peut se joindre à la majorité, et c’est ce que fait tout homme sage lorsqu’il sait où elle est, et ce qui constitue l’homme ou plutôt l’homme libre.

  1. Petite monnaie.