Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 3, 1839.djvu/174

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

jamais un sujet déloyal. Mais notre déjeuner nous attend ; M. Fitzgerald a fait une longue course par une matinée froide ; hâtons-nous de finir cette besogne.

Borroughcliffe fit signe au sergent d’ouvrir la porte, et toute la compagnie entra dans la chambre.

— Votre prisonnier s’est évadé ! s’écria le jeune cornette, qui n’eut besoin que d’un instant pour s’assurer du fait.

— Non ! non ! impossible ! il n’en est rien ! s’écria Dillon, frémissant de rage. Et après avoir lancé des regards furieux de tous côtés dans l’appartement, il s’écria avec un nouvel accent de colère : — Il y a eu ici trahison ! trahison infâme contre le roi !

— Et qui en est coupable, monsieur Christophe Dillon ? demanda le capitaine Borroughcliffe en serrant les dents et en fronçant les sourcils. Oseriez-vous, quelqu’un oserait-il accuser de trahison un seul individu appartenant au régiment dans lequel je sers ?

Un sentiment tout différent de la rage parut en ce moment agiter le futur juge. Il s’aperçut tout d’un coup qu’il était sage de mettre des bornes à son emportement, et il reprit, comme par un effet magique, le ton hypocrite et insinuant qui lui était ordinaire.

— Le colonel Howard, dit-il, comprendra la cause de la chaleur que j’ai montrée, quand je lui aurai appris que c’est dans cette chambre qu’a été enfermée hier soir cette honte de son nom et de son pays, ce traître à son roi, Richard Griffith, lieutenant dans la marine des rebelles.

— Quoi ! s’écria le colonel en tressaillant, ce jeune téméraire aurait-il osé souiller mon domicile de sa présence ? Vous rêvez, Kit ; il ne peut avoir commis une telle imprudence.

— Je n’y vois pas tant d’imprudence, Monsieur ; car quoiqu’il soit bien certain qu’il a été enfermé hier soir dans cette chambre il ne s’y trouve plus ce matin. Et cependant, quoique la fenêtre soit ouverte, il paraît impossible qu’il se soit échappé par la croisée, quelque assistance qu’on lui ait prêtée.

— Si je croyais que ce jeune audacieux eût osé se rendre coupable d’un tel acte d’impudence, je serais tenté de reprendre les armes, malgré mon âge, pour le punir de son effronterie. Quoi ! n’est-ce pas assez qu’il ait pénétré dans ma demeure à la Caroline, profitant des désastres du temps où nous vivons, avec l’intention