Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 3, 1839.djvu/227

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

où est Kit encore une fois ? où est mon parent, le docile, le prudent, le judicieux et loyal Christophe ?

— Le cacique ? non adest, comme l’a dit plus d’un huissier de quelques fins compères de notre régiment qui ne se montraient pas quand on avait besoin de leur présence. Mais le cornette de dragons m’a donné lieu de croire que Sa Seigneurie provinciale, qui s’était rendue à bord du cutter pour y porter des informations sur la position de l’ennemi, y est restée pour partager les dangers et la gloire du combat naval.

— Oui, oui, s’écria le colonel en se frottant les mains de plaisir, rien n’est plus probable ; cela est digne de lui. Il a oublié les lois et ses occupations paisibles, au son des préparatifs militaires, et il a porté dans le combat la tête d’un homme d’État et l’ardeur bouillante d’un jeune homme.

— Le cacique est prudent et discret, dit Borroughcliffe d’un ton sec et caustique ; s’il faut qu’il se trouve au milieu des périls d’un combat, il n’oubliera sans doute pas ce qu’il se doit à lui-même ainsi qu’à la postérité. Mais je suis surpris qu’il ne soit pas de retour, car il y a déjà longtemps que le schooner a baissé son pavillon, comme je l’ai vu de mes propres yeux.

— Pardon, Monsieur, s’écria Griffith en s’avançant vers eux avec un empressement que lui donnait l’inquiétude ; j’ai entendu sans le vouloir la fin de votre conversation, et je ne crois pas que vous jugiez nécessaire de cacher la vérité à un prisonnier désarmé. Ne disiez-vous pas qu’un schooner a été pris ce matin ?

— C’est une vérité incontestable, répondit Borroughcliffe d’un ton et d’un air qui faisaient honneur à sa délicatesse. Je me suis abstenu de le dire, parce que je pensais que vos propres infortunes étaient bien assez pour vous. — Monsieur Griffith, je vous présente le colonel Howard, chez qui vous recevrez hospitalité avant que nous nous séparions.

— Griffith ! s’écria vivement le colonel ; Griffith ! Quel spectacle pour mes pauvres yeux ! Le fils de mon ancien ami, du brave et loyal Hugues Griffith, captif, et pris les armes à la main contre son roi ! Jeune homme, jeune homme, qu’aurait dit votre digne père, n’aurait dit l’ami de son cœur, mon frère Harry, s’il avait plu à Dieu qu’ils eussent assez vécu pour voir cette honte éternelle, cette tache à jamais imprimée sur votre nom honorable ?