Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 3, 1839.djvu/244

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galerie longue et obscure, au bout de laquelle une porte entr’ouverte leur fit voir un appartement bien éclairé.

Dillon s’avança rapidement vers cette porte, et l’ouvrant tout à fait montra aux yeux du contre-maître une scène semblable, dans tous ses détails, à celle que nous avons décrite en présentant pour la première fois le colonel Howard à nos lecteurs. On y remarquait de même un excellent feu de charbon brillant dans la grille de la cheminée, les lumières sur la table et le buffet, la table d’acajou bien luisante, le flacon de cristal plein d’une liqueur généreuse ; la seule différence était dans le nombre des convives. Le maître de la maison et Borroughcliffe étaient assis en face l’un de l’autre, s’entretenant des événements du jour et se passant assez fréquemment l’un à l’autre le cristal contenant la liqueur qu’ils aimaient tous deux presque également, et que chaque instant rendait plus léger.

— Si seulement Kit revenait, s’écria le colonel qui avait le dos tourné du côté de la porte ; s’il me montrait son front loyal couronné de lauriers, comme il l’est, ou comme il doit l’être, je crois, Borroughcliffe, que je serais le plus heureux des sujets de Sa Majesté !

Le capitaine, qui depuis la victoire qu’il avait remportée se trouvait relevé de son vœu et libre d’humecter son gosier sans contrainte, étendit une main vers la porte, tandis qu’il prenait le flacon de l’autre, et s’écria :

— Eh ! voici le cacique lui-même, et son front qui attend le diadème ! Ah ! qui avons-nous donc à la suite de Son Altesse ? De par Dieu ! seigneur cacique, si vous voyagez avec une garde du corps composée de pareils grenadiers, le vieux Frédéric de Prusse lui-même pourra vous porter envie. Six pieds, sur ma foi, sans autres bas que ceux de la nature, et un bras digne de l’arme qu’il porte !

Le colonel n’écouta pas la moitié des exclamations de son compagnon ; car, s’étant retourné à la hâte, il aperçut l’homme dont il avait tant désiré la présence, et il le reçut avec un plaisir d’autant plus vif qu’il était inattendu. Pendant quelques minutes Dillon fut obligé d’écouter les questions rapides et multipliées de son vénérable parent, et il y répondit avec une réserve inspirée peut-être par la présence du contre-maître.

Tom Coffin restait avec un sang-froid imperturbable appuyé