Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 3, 1839.djvu/262

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— Ce qu’il n’a pas dessein d’exécuter, répondit Catherine. Suivez-moi, brave Tom. Moi, du moins, je suis un guide que vous pouvez suivre avec confiance.

— Cruelle miss Plowden ! reprit Dillon au désespoir. Bonne et douce miss Dunscombe, vous ne refuserez pas d’élever la voix en ma faveur ; votre cœur n’est pas endurci par les dangers imaginaires de ceux que vous aimez

— Ne vous adressez pas à moi, répondit-elle en baissant les yeux. J’espère que votre vie n’est pas en danger.

— Allons, partons ! s’écria Tom en prenant Dillon par le collet et en l’entraînant vers le corridor ; et faites-y bien attention, si vous dites un seul mot, si vous soufflez le quart aussi haut qu’un jeune marsouin qui vient renifler l’air pour la première fois, je vous éviterai la peine de venir à bord de l’Ariel. Songez que ce harpon a la pointe bien affilée, et que vous n’avez pas une couche de graisse aussi épaisse qu’une baleine.

Cette menace réduisit au silence l’infortuné captif qui osait à peine respirer. Catherine marchait devant eux d’un pas léger ; et après les avoir fait passer par plusieurs corridors, elle ouvrit une petite porte et les fit entrer dans le jardin. Sans s’arrêter un instant pour délibérer, elle le traversa dans toute sa largeur et arriva à une porte de derrière qui donnait sur une prairie. Montrant alors au contre-maître le sentier dont elle lui avait parlé, et qu’on distinguait parce que l’herbe en était foulée, elle lui dit adieu en priant Dieu de le protéger, d’un ton qui montrait l’intérêt qu’elle prenait à sa sûreté ; et, rentrant dans le jardin, elle disparut comme un être aérien.

Tom n’avait pas besoin qu’on lui dît de doubler le pas. Dès qu’il vit le chemin qu’il devait suivre, il resserra sa ceinture, appuya son harpon sur son épaule, et avança d’une vitesse qui forçait son compagnon à faire les plus grands efforts pour le suivre. Une ou deux fois Dillon voulut bien lui adresser la parole ; mais le mot silence ! prononcé d’un ton dur par le contre-maître, le forçait toujours à se taire. Enfin, voyant qu’ils approchaient des rochers, il fit un dernier effort pour obtenir sa liberté, en lui offrant une somme considérable. Coffin ne lui répondit rien, mais tandis que Dillon se flattait déjà d’avoir produit sur lui quelque impression, il sentit la pointe du harpon appuyée sur sa poitrine.