Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 3, 1839.djvu/315

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l’être. Si vous aviez entendu les cruels soupçons de ma cousine Cécile ; si votre imagination avait pu vous retracer les idées qui se présentaient la mienne, les tentations dont j’étais assaillie, à l’instant où ma langue soutenait que vous n’aviez pris aucune part au crime dont on vous soupçonnait, vous auriez appris qu’il est bien plus facile de défendre ceux que nous aimons contre les attaques ouvertes que de fermer l’entrée de son cœur à la crainte qu’ils ne soient véritablement coupables.

— Ces mots, ceux que nous aimons et la crainte qu’ils ne soient coupables, vous déchargent de toute accusation, dit Barnstable avec gaieté ; et après avoir prodigué les plus tendres consolations à Catherine, qui était émue jusqu’aux larmes, il lui raconta brièvement de quelle manière Dillon était mort. Je me flattais, ajouta-t-il après avoir terminé ce récit, que miss Howard m’estimait assez pour ne pas concevoir contre moi d’aussi injustes soupçons. Griffith est un mauvais représentant de notre profession s’il a souffert qu’on prît une pareille idée de nos principes.

— Si vous eussiez été prisonnier au lieu de M. Griffith, et qu’il eût commandé votre schooner, je ne sais s’il aurait échappé à mes soupçons. Vous ne vous figurez pas combien nous nous sommes rempli l’esprit d’affreuses images d’otages, de représailles et d’exécutions militaires. Mais vous m’avez soulagé le cœur du poids d’une montagne, et maintenant je pourrais presque dire poétiquement que je suis prête à descendre la vallée de la vie en votre compagnie.

— C’est une sage détermination, Catherine, et que Dieu vous bénisse pour l’avoir prise ! La compagnie ne sera peut-être pas aussi bonne que vous le mériteriez, mais du moins vous me trouverez ambitieux de recevoir vos éloges. Maintenant songeons aux moyens de mettre nos desseins à exécution.

— Et maintenant il faut que je vous fasse part d’une des difficultés que je prévois. Je crains fort que M. Griffith ne détermine pas Cécile à le suivre contre sa…, dirai-je sa raison, sa volonté, son caprice, Barnstable ? Jamais Cécile ne consentira à abandonner son oncle, et jamais je n’aurais le courage d’abandonner ma cousine, même pour suivre M. Richard Barnstable.

— Parlez-vous du fond du cœur, Catherine ?

— À peu près, sinon tout à fait.

— J’ai donc été cruellement trompé ! Il est plus facile de trouver