Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 3, 1839.djvu/322

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maison, je vais voir qui sont ceux qui y arrivent ainsi à une heure indue. Si ce sont des amis, ils seront les bienvenus, quoique leur visite ne nous ait pas été annoncée ; si ce sont des ennemis, ils recevront l’accueil que doit leur faire un vieux soldat.

— Non ! non ! s’écria Cécile ; mise tout à fait hors de garde par l’air et les discours de son oncle, en se jetant dans ses bras ; non, mon oncle, ne vous exposez pas à de si terribles dangers ! mon bien et cher oncle, vous n’êtes plus jeune ; vous avez déjà fait plus que votre devoir n’exigeait de vous ; pourquoi voudriez-vous courir au devant des périls ?

— La terreur fait délirer cette pauvre fille, Borroughcliffe, s’écria le colonel en jetant sur sa nièce un regard attendri ; il faudra que vous me donniez quatre hommes et un caporal pour garder le bonnet de nuit d’un vieux goutteux, sans quoi Cécile ne dormira guère jusqu’au lever du soleil. Eh bien ! capitaine, pourquoi ne vous levez-vous pas ?

— Pourquoi me lèverais-je, colonel ? s’écria le capitaine. Miss Plowden a encore la bonté de me tenir compagnie à table, et il n’est pas dans la nature qu’un militaire déserte en même temps sa bouteille et son drapeau. Les sourires d’une belle dame enchaînent un soldat à son poste dans un salon, comme son drapeau sur le champ de bataille.

— Je n’éprouve aucune crainte, capitaine Borroughcliffe ; dit Catherine, parce que je n’ai pas habité si longtemps Sainte-Ruth sans avoir appris à connaître tous les airs que le vent peut jouer en sifflant contre les cheminées et les grands murs de l’abbaye. Le bruit qui a engagé le colonel Howard à se lever, et qui a alarmé ma cousine avec si peu de raison, n’est autre chose que le son de la harpe éolienne de cette vieille maison.

Elle parlait ainsi avec calme et tranquillité, et le capitaine la regardait avec un air d’admiration qui appela de nouvelles roses sur ses joues. Quand il lui répondit, elle put remarquer quelque chose d’équivoque dans son ton et ses manières.

— J’ai fait ma déclaration d’élégance, dit-il, et j’y serai fidèle. Tant que miss Plowden daignera nous accorder sa compagnie, elle me trouvera au nombre de ses plus constants adhérents, quoi qu’il puisse arriver.

— Vous me forcez à me retirer, quelles qu’aient pu être mes bonnes intentions à cet égard, répondit Catherine ; car la vanité