Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 3, 1839.djvu/407

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— À l’instant même, ma chère enfant, répondit le colonel, ou je manquerais à mes devoirs. Je vais me trouver dans quelques minutes face à face avec vos parents, mes chères filles, car l’homme mourant qui n’espère pas rejoindre le digne Hugues Griffith et l’honnête John Plowden, ne peut avoir une idée bien claire des récompenses que mérite celui qui a vécu fidèle à sa patrie et loyal envers son roi. Je me flatte que personne ne peut m’accuser d’avoir jamais oublié ce qui est dû à votre sexe ; mais ce n’est pas le moment d’écouter les vains scrupules d’une délicatesse pointilleuse, quand mes jours sont des minutes, et que j’ai à m’acquitter d’un devoir dont je me regarde comme responsable envers le ciel. Je ne mourrais pas en paix, mes enfants, si je vous laissais à l’abandon sur le vaste Océan, je pourrais dire dans ce vaste univers, sans assurer des protecteurs à votre jeunesse et à votre innocence. Puisqu’il a plu à Dieu de vous retirer votre tuteur, que sa place soit remplie par ceux dont il paraît avoir fait choix lui-même.

Cécile n’hésita plus. Elle se leva lentement et offrit sa main à Griffith avec un air de résignation. Catherine se laissa conduire par Barnstable à côté de sa cousine, et le chapelain, qui avait tout écouté avec attendrissement, obéissant à un coup d’œil de Griffith, ouvrit le livre dans lequel il avait cherché des consolations pour le quartier-maître expirant, et commença à lire d’une voix tremblante les prières du mariage. Les deux cousines, baignées de larmes, prononcèrent leurs vœux solennels d’une voix plus distincte et plus intelligible, qu’elles ne l’auraient probablement fait au milieu de la pompe et de la gaieté qui environnent une pareille cérémonie dans le monde ; car bien quelles prononçassent un serment irrévocable en proclamant ainsi la préférence qu’elles accordaient aux hommes auxquels elles enchaînaient leur destinée, tout sentiment, de timidité, était absorbé par l’émotion et la douleur.

Quand la bénédiction nuptiale eut été prononcée, Cécile appuya sa tête sur l’épaule de son époux, auquel elle venait d’être unie, y resta un moment versant un torrent de larmes, et allant reprendre sa place près du sofa, s’agenouilla de nouveau devant son oncle. Catherine reçut d’un air froid le baiser que Barnstable lui donna avec distraction, et retourna aussi près du colonel.

Le colonel Howard avait réussi à se soulever sur un coude pour