Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 6, 1839.djvu/18

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couvrait la terre, diapraient de brillantes couleurs. La route, tournant sur les flancs de la montagne, était soutenue d’un côté par une fondation de troncs d’arbres entassés les uns sur les autres, jusqu’à une profondeur de plusieurs pieds, tandis que de l’autre on avait creusé dans le roc un passage de largeur suffisante pour le peu de voyageurs qui la fréquentaient à cette époque. Mais tout ce qui ne s’élevait pas à plusieurs pieds au-dessus de la terre était alors enseveli sous une couche profonde de neige, et l’on ne distinguait le chemin que parce que la neige, battue sous les pieds des chevaux et des piétons, offrait un sentier de deux pieds plus bas que toute la surface qui l’environnait. Dans la vallée que l’œil découvrait à plusieurs centaines de pieds, on avait fait un défrichement considérable, et l’on y voyait toutes les améliorations qui annoncent un nouvel établissement. Les flancs de la montagne avaient même été préparés pour être mis en culture jusqu’à l’endroit où la route se détournait pour entrer dans une plaine située presque au même niveau ; mais une forêt en couvrait encore toute la partie supérieure, et s’étendait ensuite fort loin.

Les beaux chevaux bais attelés au sleigh étaient presque entièrement couverts du givre qui remplissait l’atmosphère de particules brillantes. Leurs naseaux répandaient des nuages de fumée. Tout ce qu’on apercevait, de même que l’accoutrement des voyageurs, annonçait la rigueur de l’hiver dans ces régions montagneuses. Les harnais, d’un noir mat, bien différent du vernis brillant qu’on emploie aujourd’hui, étaient garnis de boucles et d’énormes plaques de cuivre jaune qui brillaient comme de l’or aux rayons obliques du soleil couchant. De grosses selles, ornées de clous à tête ronde, de même métal, et d’où partait une couverture de drap qui descendait sur une partie de la croupe, des flancs et du poitrail des chevaux, soutenaient des anneaux en fer par où passaient les rênes Le conducteur, jeune nègre, qui paraissait avoir environ vingt ans, et d’un teint lustré, était bigarré par le froid, et ses grands yeux brillants laissaient échapper des gouttes d’une eau qui prenait sa source dans la même cause. Sa physionomie offrait pourtant un air de bonne humeur, car il pensait qu’il allait arriver chez son maître, y trouver un bon feu, et jouir de la gaieté qui ne manque jamais d’accompagner les fêtes de Noël.