Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 6, 1839.djvu/202

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et offrirent encore au petit nombre de voyageurs qui les fréquentaient des difficultés et des dangers sans nombre. Eu un mot, tout annonçait un changement complet, non seulement sur la surface de la terre, mais encore dans les occupations de ceux à qui elle accordait des moyens de bien-être et de prospérité.

Ce fut par un beau jour de la fin de mars que le shérif proposa une partie de promenade à cheval sur une montagne située sur le bord du lac, et d’où l’on jouissait d’une vue pittoresque et magnifique.

— D’ailleurs, ajouta-t-il, nous verrons, en passant, Billy Kirby travailler à faire du sucre, car il en fait en ce moment de ce côté pour Jared Ransom. Personne ne connaît mieux ce métier que Billy Kirby, et cela n’est pas étonnant, car vous devez vous rappeler, cousin ’Duke, que la première année de notre arrivée ici, quand nous n’étions encore que campés, je le pris avec moi pour m’aider à cette fabrication.

— C’est un excellent bûcheron que Billy, dit Benjamin, qui tenait la bride du cheval que le shérif allait monter, et il manie sa hache aussi bien que le soldat de marine sa pique d’abordage, et le tailleur son fer à rabattre les coutures. On dit qu’il ôte du feu une chaudière de potasse avec ses mains aussi facilement qu’un matelot porte une trousse de cordages ; je ne puis dire que je l’aie vu de mes propres yeux, mais on le dit. À l’égard du sucre, j’en ai vu de sa façon ; il n’était pas aussi blanc qu’une vieille toile d’artimon, mais mon ancienne amie, mistress Pettibone, prétendait qu’il avait le goût de véritable mélasse, et je n’ai pas besoin de vous dire, monsieur Jones, qu’il reste dans le râtelier de mistress Remarquable une dent qui se connaît en douceurs.

Ce sarcasme fit beaucoup rire celui qui en était l’auteur et celui à qui il était adressé, nouvelle preuve de l’analogie qui régnait dans le caractère de ce digne couple. Mais le reste de la société n’eut pas le bonheur de l’entendre, car chacun était occupé à monter à cheval, ou à aider les dames à se mettre en selle. La cavalcade traversa les rues du village dans le plus grand ordre, s’arrêta un instant à la porte de M. Le Quoi pour lui proposer d’être de la partie, et le Français, y ayant consenti, ne se fit attendre que le temps nécessaire pour brider et seller son cheval. Quittant alors le village, ils prirent la route qui conduisait à la montagne. Comme la gelée qu’il faisait encore toutes les nuits se