Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 6, 1839.djvu/206

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vieil ami John Mohican ; et sa science, ou celle de Bas-de-Cuir, pourra peut-être y répondre.

— Ignorez-vous donc véritablement leur langue ? demanda Élisabeth avec une vivacité qui montrait qu’elle mettait quelque intérêt à cette question.

— Pas tout à fait, répondit Edwards ; mais je connais un peu mieux celle que vient de parler M. Jones, et même celle de M. Le Quoi.

— Vous sauriez le français ? s’écria Élisabeth avec un accent de surprise.

— C’est une langue familière aux Iroquois et dans tout le Canada, répondit le jeune homme avec un sourire d’une nature équivoque.

— Mais les Iroquois, ajouta Élisabeth, sont vos ennemis, ce que vous appelez des Mingos.

— Fasse le ciel que je n’en trouve pas de plus dangereux ! s’écria Edwards ; et, donnant un coup d’éperon à son cheval, il fit quelques pas en avant pour ne plus se trouver obligé à avoir recours à des réponses évasives.

La conversation ne tomba pourtant pas, grâce à Richard, qui se chargea de la soutenir, et ils arrivèrent bientôt sur le plateau de la montagne, qui formait une plaine assez étendue. Les pins avaient disparu sous les coups de la hache du défricheur ; mais on y avait conservé un petit bois de ces arbres précieux qui venaient de faire le sujet de la conversation. Toutes les broussailles en avaient été coupées jusqu’à une certaine distance, probablement pour alimenter le feu des chaudières, de sorte qu’on voyait un espace de plusieurs acres qu’on aurait pu comparer à un dôme immense dont les troncs des érables auraient formé les colonnes, leur cime les chapiteaux, et le firmament la voûte. Une profonde incision avait été faite, sans aucun soin, dans le tronc de chaque arbre, à peu de distance de la racine ; de petites gouttières d’écorce d’aune ou de sumac y étaient attachées, pour recevoir la sève qui coulait partie par terre, partie dans un vase de bois grossièrement creusé, qui était placé au pied de chaque érable.

En arrivant au haut de la montagne, la compagnie s’arrêta un instant pour laisser souffler les chevaux, et pour considérer une scène qui était nouvelle pour quelques-uns de ceux qui en faisaient partie. Pendant ce moment de silence, une voix forte se fit