Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 6, 1839.djvu/281

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une sorte d’instinct, la portion des vêtements qui pouvaient la gêner, et en même temps, animant le chien, leur seule sauvegarde, en lui faisant entendre les accents d’une voix qui commençait à trembler.

— Courage, Brave ! s’écria-t-elle. Courage, mon bon Brave ! défends ta maîtresse !

La panthère était une femelle, elle avait avec elle un petit, parvenu environ au quart de sa croissance, qui l’avait suivie sur les premières branches du même arbre, et qu’Élisabeth n’avait pas encore aperçu. Il se fit voir en ce moment en descendant de l’arbre, et en s’avançant vers le chien avec des mouvements qui tenaient de la férocité de sa mère et de la gaieté d’un jeune chat. Tantôt il s’arrêtait au pied d’un arbre, se dressait sur ses pattes de derrière, et en arrachait l’écorce avec celles de devant ; tantôt se battant les flancs de sa queue, et grattant la terre, il imitait les hurlements maternels.

Pendant ce temps, Brave restait ferme, sans changer de position, à trois pas en avant de sa maîtresse, son corps appuyé en arrière sur ses hanches, et suivant des yeux tous les mouvements de la mère et de son petit. À chaque bond que faisait le dernier, il approchait davantage, et tout à coup il tomba, peut-être sans en avoir le dessein, presque sur Brave, qui, sautant sur lui au même instant, lui brisa l’épine du dos d’un coup de mâchoire, et le lança avec force en l’air, d’où il retomba sans vie sur la terre.

Élisabeth s’applaudissait du triomphe que Brave venait d’obtenir, quand elle vit la panthère sauter à bas de l’arbre, en trois bonds, dont chacun la portait à une vingtaine de pieds, s’élancer sur le chien ; ce fut alors que commença une lutte vraiment terrible, accompagnée de rugissements et de hurlements épouvantables. Miss Temple était toujours à genoux, penchée sur le corps insensible de Louise, les yeux fixés sur les deux animaux avec un intérêt d’autant plus puissant qu’elle ne pouvait oublier que sa vie semblait en dépendre. La panthère faisait des bonds si fréquents et si rapides qu’elle semblait presque toujours en l’air. Le chien, animé par le combat, cherchait toujours à faire face à son ennemi, mais il ne pouvait empêcher la panthère de lui retomber quelquefois sur les épaules, ce qui était le but constant des efforts de celle-ci. Alors quoiqu’il fût déchiré par ses griffes, et que son sang coulât déjà de plusieurs blessures, il la secouait