Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 6, 1839.djvu/314

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— Nos plans sont renversés, mon enfant, lui dit-il ; l’obstination de Bas-de-Cuir a attiré sur lui l’animadversion des lois et il m’est impossible de l’en préserver.

— Comment ! de quelle manière ? s’écria Élisabeth. L’amende n’est qu’une bagatelle, et…

— Comment aurais-je pu supposer, continua Marmaduke, qu’un vieillard, un homme comme lui, oserait s’opposer à l’exécution d’un mandat légal, menacer un officier public, insulter un magistrat ? S’il se fût soumis à la perquisition, j’aurais payé l’amende pour lui, et la loi eût été satisfaite ; mais à présent il faut qu’il en subisse la rigueur.

— Et quelle sera sa punition, Monsieur ? demanda Edwards d’un ton qui annonçait une vive agitation.

— Vous êtes ici, Monsieur ! je ne vous avais pas vu. Je ne puis répondre à cette question. Il n’est pas d’usage qu’un juge décide quel sera le châtiment d’un accusé, avant d’avoir entendu l’accusation, les preuves, la défense et la déclaration des jurés. Mais vous pouvez être certain d’une chose, monsieur Edwards, c’est que, quoi qu’il puisse m’en coûter, après le service qu’il a rendu à ma fille, je n’en ferai pas moins ce que la loi et la justice exigent de moi.

— Comment serait-il possible de douter de la justice du juge Temple ? dit Edwards avec amertume. Mais parlons avec calme, Monsieur. La vieillesse, les habitudes, l’ignorance de Natty ne peuvent-elles l’excuser ?

— Elles peuvent atténuer sa faute, mais non la justifier. Pourrait-on vivre en société, si les hommes répondaient avec le fusil aux ministres de la justice ? Est-ce pour cela que j’ai peuplé le désert, que je l’ai civilisé ?

— Si vous aviez dompté les animaux féroces qui menaçaient la vie de votre fille il n’y a que quelques heures, Monsieur, votre raisonnement serait plus applicable à la circonstance.

— Olivier ! s’écria Élisabeth.

— Paix, ma fille ! ce jeune homme est injuste, et je ne lui ai pas donné sujet de l’être. Je vous pardonne cette remarque, monsieur Edwards, parce que je sais que vous êtes ami de Natty, et que c’est cette amitié qui vous fait passer les bornes de la discrétion.

— Oui, je suis son ami, et je me fais gloire de l’être. Il est