Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 6, 1839.djvu/335

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plus grave, celle de meurtre ou de tentative de meurtre. — Et maintenant, Messieurs, dit-il pour conclure : vous ayant expliqué clairement le crime dont ce malheureux s’est rendu coupable (je dis malheureux autant à causer de son ignorance que de son crime), je laisse la décision à vos consciences, ne doutant pas que vous reconnaîtrez l’importance (quoique le conseil du prisonnier, comptant probablement sur votre première déclaration, cherche à avoir l’air sûr du succès) de punir le coupable et de venger la dignité des lois[1].

Ce fut alors le tour du juge à parler. M. Temple fit le résumé de l’affaire avec autant de concision que de clarté, et plaça les faits sous les yeux du jury dans leur jour véritable. Il appuya sur la nécessité de faire respecter les lois dans une société naissante, et sur les dangers auxquels elle serait exposée si l’on souffrait qu’elles fussent enfreintes impunément. Mais, d’une autre part, il fit valoir comme motif d’atténuation l’âge, les habitudes et l’ignorance du prisonnier, et finit par dire que si les jurés croyaient que le vieillard qui attendait leur décision avait agi sans intentions criminelles, ils devaient le juger avec quelque indulgence.

Les jurés restèrent plus longtemps en délibération que lors de la première affaire, mais l’intérêt public l’emporta sur la compassion que leur inspirait le prisonnier, et les faits dont il était accusé étant bien prouvés, ils le déclarèrent coupable.

Le juge causa un instant avec ses assesseurs et se prépara ensuite à prononcer la sentence.

— Natty Bumppo, dit-il…

Le vieux chasseur, qui, pendant la délibération du jury, était resté les coudes placés sur ses genoux, et la tête appuyée sur ses mains, se leva en entendant son nom, et s’écria d’un ton militaire :

— Présent[2] !

— Silence ! dit le juge. La cour prenant en considération votre ignorance des lois et votre âge, vous remet la peine des verges qu’elle a le droit de prononcer en pareil cas ; mais comme l’intérêt général exige que le châtiment soit public, elle vous con-

  1. On sent bien que cet entrecroisement de parenthèses est une traduction littérale du texte.
  2. Here : réponse du soldat sous les armes. Nous renvoyons le lecteur à une des dernières notes de la Prairie.