Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 8, 1839.djvu/207

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

que je ne ferais pas grand chemin d’avant dans le sommeil, quand j’essaierais de me faire bercer dans un hamac.

— Combien y a-t-il de temps que vous avez vu ce navire sous le vent ? demanda gravement Wilder.

— Je ne jurerais pas que ce soit véritablement un navire vivant, monsieur ; j’ai bien vu quelque chose un instant avant que la cloche sonnât sept heures, et ce que j’ai vu, ceux qui ont de bons yeux peuvent encore le voir aussi clair ou aussi obscur.

— Et comment nous restait-il, quand vous l’avez vu pour la première fois ?

— Deux ou trois points de plus vers le beau qu’à présent.

— En ce cas, nous le passons ! s’écria Wilder avec un plaisir trop manifeste pour pouvoir le cacher.

— Non, votre honneur, non. Vous oubliez que nous avons pincé le vent de plus près depuis le commencement du quart de quatre.

— Vous avez raison, répliqua son jeune commandant avec un ton de désappointement ; cela est vrai, très vrai. — Et sa position relative n’a pas changé depuis que vous l’avez aperçu ?

— Non, d’après le compas, monsieur ; il faut qu’il soit bon voilier, sans quoi il ne pourrait tenir compagnie comme il le fait à la Royale Caroline, surtout quand elle à une bouline bien raide, ce qui, comme chacun le sait, est le vrai boute-en-train de ce bâtiment.

— Allez, allez retrouver votre hamac ; au lever du soleil nous aurons une meilleure vue de ce vaisseau.

— Et vous m’entendez, monsieur, ajouta le prudent lieutenant, n’allez pas tenir ouverts les yeux de vos camarades en leur faisant un conte aussi long qu’un câble. Prenez le repos dont vous avez besoin, et laissez ceux qui ont la conscience nette en faire autant.

— Monsieur Earing, dit Wilder quand le matelot se fut retiré fort à contre-cœur pour gagner son hamac, nous ferons courir au navire une autre bordée, et nous avancerons du côté de l’est, tandis que la terre est si loin de nous. Cette manœuvre nous portera vers Hatteras. D’ailleurs.

— Oui, monsieur, répondit le lieutenant, remarquant que son commandant hésitait, comme vous le disiez, — d’ailleurs personne ne peut prévoir combien durera un ouragan, ni de quel côté il peut arriver.