Page:Coppée - Œuvres complètes, Poésies, t1, 1885.djvu/244

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Et là-bas, son enfant, éveillé dans sa couche,
Réclamait à grands cris et cherchait de la bouche
Ce giron où l’on boit la vie avec le lait,
Premier asile humain duquel on l’exilait.
C’est ainsi qu’elle dut passer la nuit entière,
Tout en larmes, mettant la tête à la portière
Et buvant à longs traits l’air glacé du ciel noir,
Un peu pour se cacher, beaucoup pour ne pas voir,
En face d’elle assis, plein de vin et de vice,
Un groupe de soldats revenant du service
Et qui, par sa présence honnête mis en train,
Vociféraient en chœur un immonde refrain :
Le tout puant le cuir, le rhum et le cigare.

A Paris, un laquais l’attendait à la gare.
— Un coupé qu’emportait un cheval très-fringant
La conduisit devant un perron élégant
Où les autres laquais dirent : – C’est la nourrice.
Dans une chambre mauve, adorable caprice
De blonde, elle aperçut un berceau près d’un lit,
Et devant cet heureux spectacle elle pâlit.
En voyant cette jeune et jolie accouchée,
Blanche, et sur le berceau de dentelle penchée,
Devant ce doux sommeil d’enfant s’extasier,
Elle crut voir le sien dans son berceau d’osier,