Page:Coppée - Œuvres complètes, Poésies, t1, 1885.djvu/250

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Et, près de là, voici le houx du cabaret
D’où sort, vibrante et claire, une chanson bachique.
— Soudain la voyageuse a fait halte, tragique,
Bouche béante et comme allant pousser un cri.
Car cette voix, c’est bien celle de son mari ;
Cette ombre profilée en noir sur les fenêtres,
C’est la sienne. Il avait donc menti dans ses lettres ;
Il est toujours le même ; elle avait bien raison ;
Il boit, et le petit est seul à la maison.
Le cerveau traversé d’une affreuse lumière,.
Éperdue, elle court en hâte à sa chaumière.
La porte est entr’ouverte, elle entre. – Qu’il fait noir !
Du feu ! bien vite. – Et la malheureuse put voir,
Dans la chambre à présent sordide et demeublée,
Le reste du repas de l’ivresse attablée,
Le jambon qu’il mangea, la bouteille qu’il but,
Et, dans l’ombre, parmi les choses de rebut,
Sale, brisé, couvert de toiles d’araignée,
— Objet horrible aux yeux d’une mère indignée
Et qu’on avait jeté dans ce coin sans remord, –
L’humble berceau d’osier du petit enfant mort.

Elle tomba. C’était la fin du sacrifice.