Page:Coppée - Œuvres complètes, Poésies, t1, 1885.djvu/266

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Il se vit sans amis, pauvre, célibataire,
Vieil enfant étonné d’avoir des cheveux gris ;
Il sentit que son âme et son corps avaient pris,
Depuis vingt ans, la lente et puissante habitude
De l’ennui, du silence et de la solitude ;
Qu’il n’avait prononcé qu’un mot d’amour : « maman »
Et qu’il n’espérait plus que son simple roman
Pût s’augmenter jamais d’un plus tendre chapitre.
— Le jour à son bureau, le soir à son pupitre,
Il revint donc s’asseoir, résigné, mais vaincu ;
Et, libre, il vit ainsi qu’esclave il a vécu.
Même dans la maison qu’il habite, personne
Ne songe qu’il existe, et, la nuit, quand il sonne,
Le vieux portier, – il a soixante-dix-sept ans
Et perd la notion des choses et du temps, –
Se réveille, maussade, et murmure en son antre :
— C’est le petit garçon du cinquième qui rentre.