Page:Corbière - Les Amours jaunes, 1873.djvu/321

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Tu savais tous les noms, les cancans d’alentour,
Et de terre et de mer, et de nuit et de jour !…

Je te disais ce que je savais écrire…
Et nous nous comprenions — tu ne savais pas lire —
Mais ta philosophie était un puits profond
Où j’aimais à cracher, rêveur… pour faire un rond.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .


Un jour — ce fut ton jour ! — Je te vis redoutable :
Sous ton bras fiévreux cahotait la table
Où nageait, épars, du papier timbré ;
La plume crachait dans tes mains alertes
Et sur ton front noir, tes lunettes vertes
Sillonnaient d’éclairs ton nez cabré…

— Contre deux rasoirs d’Albion perfide,
Nous verbalisions ! tu verbalisais !
« Plus les deux susdits… dont un baril vide… »
J’avais composé, tu repolissais…

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

— Comme un songe passé, douanier, ces jours de fête !

Fais valoir maintenant tes droits à la retraite…