Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 2.djvu/151

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Que vous pussiez m’aimer après tant de tourment,
Et d’un mauvais ami faire un heureux amant !
Mais, hélas ! je vous sers, je vis sous votre empire,
Et je ne puis prétendre où mon désir aspire.
Théante ! (ah, nom fatal pour me combler d’ennui !)
Vous demandez mon cœur, et le vôtre est à lui !
Souffrez qu’en autre lieu j’adresse mes services,
Que du manque d’espoir j’évite les supplices.
Qui ne peut rien prétendre a droit d’abandonner.

Amarante.

S’il ne tient qu’à l’espoir, je vous en veux donner.
Apprenez que chez moi c’est un faible avantage
De m’avoir de ses vœux le premier fait hommage.
Le mérite y fait tout, et tel plaît à mes yeux,
Que je négligerais près de qui vaudrait mieux.
Lui seul de mes amants règle la différence,
Sans que le temps leur donne aucune préférence.

Florame.

Vous ne flattez mes sens que pour m’embarrasser.

Amarante.

Peut-être ; mais enfin il faut le confesser,
Vous vous trouveriez mieux auprès de ma maîtresse.

Florame.

Ne pensez pas…

Amarante.

Ne pensez pas… Non, non, c’est là ce qui vous presse.
Allons dans le jardin ensemble la chercher.
(À part.)
Que j’ai su dextrement à ses yeux la cacher !