Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 2.djvu/359

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Redouble le sommeil des gardes et du roi :
La suite au seul récit me fait trembler d’effroi.
À force de pitié ces filles inhumaines
De leur père endormi vont épuiser les veines :
Leur tendresse crédule, à grands coups de couteau,
Prodigue ce vieux sang, et fait place au nouveau ;
Le coup le plus mortel s’impute à grand service ;
On nomme piété ce cruel sacrifice ;
Et l’amour paternel qui fait agir leurs bras
Croirait commettre un crime à n’en commettre pas.
Médée est éloquente à leur donner courage :
Chacune toutefois tourne ailleurs son visage ;
Une secrète horreur condamne leur dessein,
Et refuse leurs yeux à conduire leur main.

Pollux.

À me représenter ce tragique spectacle,
Qui fait un parricide et promet un miracle,
J’ai de l’horreur moi-même, et ne puis concevoir
Qu’un esprit jusque-là se laisse décevoir.

Jason.

Ainsi mon père Eson recouvra sa jeunesse,
Mais oyez le surplus. Ce grand courage cesse ;