Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 2.djvu/410

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Seigneur, près de Jason reprend son allégresse ;
Et ce qui sert beaucoup à son contentement,
C’est de voir que Médée est sans ressentiment.

Créon.

Et quel dieu si propice a calmé son courage ?

Cléone.

Jason, et ses enfants, qu’elle vous laisse en gage.
La grâce que pour eux madame obtient de vous
A calmé les transports de son esprit jaloux.
Le plus riche présent qui fût en sa puissance
À ses remerciements joint sa reconnaissance.
Sa robe sans pareille, et sur qui nous voyons
Du Soleil son aïeul briller mille rayons,
Que la princesse même avait tant souhaitée,
Par ces petits héros lui vient d’être apportée,
Et fait voir clairement les merveilleux effets
Qu’en un cœur irrité produisent les bienfaits.

Créon.

Eh bien, qu’en dites-vous ? Qu’avons-nous plus à craindre ?

Pollux.

Si vous ne craignez rien, que je vous trouve à plaindre !

Créon.

Un si rare présent montre un esprit remis.

Pollux.

J’eus toujours pour suspects les dons des ennemis.
Ils font assez souvent ce que n’ont pu leurs armes ;
Je connais de Médée et l’esprit et les charmes,
Et veux bien m’exposer au plus cruel trépas,
Si ce rare présent n’est un mortel appas.