Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 5.djvu/159

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successeur de Phocas. Bien plus, j’ai feint que cette Léontine, ne croyant pas pouvoir cacher longtemps cet enfant que Maurice avait commis à sa fidélité, vu la recherche exacte que Phocas en faisait faire, et se voyant même déjà soupçonnée et prête à être découverte, se voulut mettre dans les bonnes grâces de ce tyran en lui allant offrir ce petit prince dont il était en peine, au lieu duquel elle lui livra son propre fils Léonce. J’ai ajouté que par cette action Phocas fut tellement gagné qu’il crut ne pouvoir remettre son fils Martian aux mains d’une personne qui lui fût plus acquise, d’autant que ce qu’elle venait de faire l’avait jetée, à ce qu’il croyait, dans une haine irréconciliable avec les amis de Maurice, qu’il avait seuls à craindre. Cette faveur où je la mets auprès de lui donne lieu à un second échange d’Héraclius, qu’elle nourrissait comme son fils sous le nom de Léonce, avec Martian, que Phocas lui avait confié. Je lui fais prendre l’occasion de l’éloignement de ce tyran, que j’arrête trois ans, sans revenir, à la guerre contre les Perses et, à son retour, je fais qu’elle lui donne Héraclius pour son fils, qui est dorénavant élevé auprès de lui sous le nom de Martian, pendant qu’elle retient le vrai Martian auprès d’elle et le nourrit sous le nom de Léonce, qu’elle avait exposé pour l’autre. Comme ces deux princes sont grands et que Phocas, abusé par ce dernier échange, presse Héraclius d’épouser Pulchérie, fille de Maurice, qu’il avait réservée exprès seule de toute sa famille, afin qu’elle portât par ce mariage le droit et les titres de l’empire dans sa maison, Léontine, pour empêcher cette alliance incestueuse du frère et de la sœur, avertit Héraclius de sa naissance. Je serais trop long si je voulais ici toucher le reste des incidents d’un poème si embarrassé, et me contenterai de vous avoir donné ces lumières afin que vous en puissiez commencer