Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 5.djvu/197

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J’ai pris pour vous sa vie, et lui rends un soupir ;
Ce n’est pas trop, Seigneur, pour un tel souvenir.
À cet illustre effort, par mon devoir réduite,
J’ai dompté la nature, et ne l’ai pas détruite.
Phocas, ravi de joie à cette illusion,
Me combla de faveurs avec profusion
Et nous fit de sa main cette haute fortune
Dont il n’est pas besoin que je vous importune.
Voilà ce que mes soins vous laissaient ignorer,
Et j’attendais, Seigneur, à vous le déclarer,
Que, par vos grands exploits, votre rare vaillance
Pût faire à l’univers croire votre naissance,
Et qu’une occasion pareille à ce grand bruit
Nous pût de son aveu promettre quelque fruit,
Car, comme j’ignorais que notre grand monarque
En eût pu rien savoir, ou laisser quelque marque,
Je doutai qu’un secret, n’étant su que de moi,
Sous un tyran si craint pût trouver quelque foi.

Exupère

Comme sa cruauté, pour mieux gêner Maurice,
Le forçait de ses fils à voir le sacrifice,
Ce prince vit l’échange, et l’allait empêcher.
Mais l’acier des bourreaux fut plus prompt à trancher :
La mort de votre fils arrêta cette envie,
Et prévint d’un moment le refus de sa vie.
Maurice, à quelque espoir se laissant lors flatter,
S’en ouvrit à Félix, qui vint le visiter,
Et trouva les moyens de lui donner ce gage
Qui vous en pût un jour rendre un plein témoignage.
Félix est mort, Madame, et naguère en mourant
Il remit ce dépôt à son plus cher parent,