Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 7.djvu/543

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D’avoir enseveli ma gloire sous ma chute.
Mais, Dieux ! se pourroit-il qu’ayant si bien servi,
Par l’ordre de mon roi le jour me fût ravi ?
1665Non, non : c’est d’un bon œil qu’Orode me regarde ;
Vous le voyez, ma sœur, je n’ai pas même un garde :
Je suis libre.

PALMIS.

Je suis libre.Et j’en crains d’autant plus son courroux :
S’il vous faisoit garder, il répondroit de vous.
Mais pouvez-vous, seigneur, rejoindre votre suite ?
1670Êtes-vous libre assez pour choisir une fuite ?
Garde-t-on chaque porte à moins d’un grand dessein ?
Pour en rompre l’effet, il ne faut qu’une main.
Par toute l’amitié que le sang doit attendre,
Par tout ce que l’amour a pour vous de plus tendre…

SURÉNA.

1675La tendresse n’est point de l’amour d’un héros :
Il est honteux pour lui d’écouter des sanglots ;
Et parmi la douceur des plus illustres flammes,
Un peu de dureté sied bien aux grandes âmes.

PALMIS.

Quoi ? vous pourriez…

SURÉNA.

Quoi ? vous pourriez…Adieu : le trouble où je vous voi
1680Me fait vous craindre plus que je ne crains le Roi.



Scène IV.

EURYDICE, PALMIS.
PALMIS.

Il court à son trépas, et vous en serez cause,
À moins que votre amour à son départ s’oppose.
J’ai perdu mes soupirs, et j’y perdrois mes pas ;