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SUR OEDIPE 3J)5

Acte III. — Féaelon a justement critiqué * les stances de Dircé qui ouvrent le troisième acte :

Impitoyable soif de gloire, Dont l'aveugle et noole transport Me fait précipiter ma mort Pour faire vivre ma mémoire, Arrête pour quelques moments Les impétueux sentiments De cette inexorable envie. Et souffre qu'en ce triste et favorable jour, Avant que te donner ma vie. Je donne un soupir à l'amour.

On n'aime pas plus que Fénelon « cette passion si façonnée ». Mais le grand défaut de ces stances, c'est qu'on ne les attend point. Nous comprenons les effusions lyriques de Rodrigue et de Polyeucte, parce qu'en leur àme se livre un combat très réel dont l'issue est encore douteuse. Quel combat se livre en l'àme de Dircé? D'avance son sacrifice est accompli ; c'est avant le sacrifice qu'il fallait placer des hésitations maintenant trop tardives. D'ailleurs ce n'est là qu'un intermède. Que Jocaste vienne, elle trouvera sa fille prête à tout, et elle s'étonnera de se heurter à cet héroïsme intraitable : « II est toujours assez tôt de mourir ! » s'écriera la mère ; mais la fille répondra par le grand mot de « gloire », mot sans réplique dans la bouche des héroïnes cornéliennes, et, de la résignation passant à la provocation, reprochera en face à sa mère de lui avoir ôtéle sceptre pour le donnera un étranger. Rien n'est plus déplaisant qu'un pareil débat, où Jocaste est réduite à invoquer le titre maternel, où Dircé s'accuse elle-même de trop de dureté :

Pardonnez cependant à cette humeur hautaine : Je veux parler en fille et je m'explique en reine... Le trône a d'autres droits que ceux de la nature. J'en parle trop peut-être alors qu'il faut mourir.

C'est notre avis : nous ne comprenons pas fort bien pourquoi elle se dévoue avec un si orgueilleux empressement, pourquoi elle repousse avec violence OEdipe, qui veut retarder l'heure fatale :

Doutez-vous qu'à mourir je ne sois toute prête?

1. Lettre à l' Académie , ch. de la Poétique.

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