Page:Corneille Théâtre Hémon tome4.djvu/378

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î. ETUDE

Mais nous sommes rassurés d'avance sur le sort de Philoctète,

dont l'héroïsme est impassible : i

Préférez, comme moi, mon honneur à la vie ; Commandez que je meure, et non pas que je fuie. ... Ne m'ordonnez pas d'être indigne de vous... J'ai vécu loin de vous, mais mon sort est trop beau Si j'emporte en mourant votre estime au tombeau.

Que nous fait ce héros trop sensible et ce trop héroïque soupi- rant '? D'ailleurs, son innocence est facilement reconnue, et il s'em- presse de disparaître. Reste la tragique révélation delà naissance et des malheurs d'OEdipe ; c'est le sujet de la seconde pièce. Mais . comment une telle révélation serait-elle saisissante, en dehors du mystère religieux et de l'horreur sacrée, dans un milieu de philo- sophes et de raisonneurs ? Qui donc la prendrait au sérieux ? Je vois bien que Tirésias intervient ici comme dans les drames précé- dents; qu'il garde une fière attitude vis-à-vis de ce roi qui le traite de « prêtre imposteur » ; qu'OEdipe passe de la colère à la stupeur .

Je ne sais où je suis, ma fureur est tranquille. 11 me semble qu'un dieu, descendu parmi nuus. Maître de mes transports, enchaîne mon courroux.

Mais nous avons beau faire, nous ne sentons pas le dieu présent ; nous ne voyons pas le bras de la destinée s'appesantir sur ce malheureux qui, dans son malheur même, est préoccupé de gar- der la dignité royale :

Ma gloire me suivra dans mon adversité ;

sur ce déclàmateur qui regarde en face le Ciel et le brave :

Misérable vertu, nom stérile et funeste!... Impitoyables Dieux, mes crimes sont les vôtres, Et vous m'en punissez 1

Nous ne pouvons prendre en pitié Jocaste elle-même, car Jocaste est trop éloquente et trop philosophe encore dans son infortune :

J'ai vécu vertueuse, et je meurs sans remords... J'ai fait rougir les Dieux, qui m'ont forcée au erime.

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