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CORRESPONDANCE LITTÉRAIRE.

les peintures de la galerie du salon d’Hercule de Versailles, et qui a présidé à toute cette grande entreprise.

M. l’abbé Millot, ancien grand vicaire de Lyon, prédicateur ordinaire du roi, vient de publier des Éléments de l’histoire de France depuis Clovis jusqu’à la fin du règne de Louis XIV. Deux volumes in-12, chacun de cinq cents pages. Voilà donc encore un abrégé ! Peu s’en faut, cependant, que je ne fasse grâce à celui-là. Le style de l’auteur est un peu plat et parfois décousu ; mais il règne un assez bon esprit dans son ouvrage, et il faut savoir gré à un grand vicaire d’avoir, en général, des principes de droit public sains, et de préférer la cause du genre humain à l’intérêt et à l’ambition de l’Église. Je me sens du faible pour ce prêtre. On peut, du moins, mettre ce livre entre les mains de la jeunesse sans craindre de lui empoisonner l’esprit par une foule de maximes détestables que le fanatisme et la fourberie ont l’insolence de professer comme des maximes d’État. M. l’abbé Millot est philosophe et vrai autant que son habit peut le permettre. Je voudrais qu’il eût plus d’imagination, plus de nerf et d’onction dans son style, et je lui conseillerais d’écrire l’histoire : car je le crois honnête homme. Son abrégé est, moins concis que celui de M. le président Hénault. Il ne comprend pas tant de choses que celui-ci ; mais il développe davantage les principaux faits. Il prétend que cela est nécessaire pour qu’ils fassent de l’effet sur l’esprit de la jeunesse, et je crois qu’il a raison.

M. Clerc, ci-devant médecin de l’hetman des cosaques, et actuellement médecin de Villers-Cotterets, petite ville à dix-sept lieues de Paris, de l’apanage de M. le duc d’Orléans, vient de publier une Histoire naturelle de l’homme considéré dans l’état de maladie, ou la Médecine rappellée à sa première simplicité. Deux gros volumes in-8°, de cinq cents pages chacun. Ce livre est écrit très-agréablement, et c’est ce qui lui a procuré une sorte de succès parmi les gens du monde qui ne sont pas en état de juger du fond. À Paris, tout le monde ; et surtout les femmes, a la manie de parler médecine, et auprès de l’ignorance un charlatan agréable a beau jeu. Le succès du livre de M. Clerc ne signifie donc rien pour moi : car, à m’en rapporter au jugement d’un savant et habile médecin, cet ouvrage n’est qu’une rapsodie faite sans jugement de ce que Bœrhaave et d’autres grands médecins