Page:Cortambert - Impressions d'un japonais en France, 1864.pdf/41

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tue. Il aime mieux se ruiner bruyamment que de s’enrichir tranquillement. C’est le mistral fait homme.

J’avouai en toute humilité qu’au Japon je n’avais jamais vu de citoyens d’intelligence aussi surprenante.

— Cher docteur, reprit mon guide, vous seriez bien plus surpris encore si je vous racontais notre histoire. Mais cela nous prendrait trop de temps. Sachez que la ville de Marseille remonte aux époques héroïques, et que le ciel, tout en lui accordant d’insignes faveurs, lui envoya la peste cinq à six fois. — Aujourd’hui, à l’imitation de toutes les villes qui se respectent, elle se détruit pour se mieux reconstruire. — Elle distribue dans le monde ses vaisseaux, ses savons, ses huiles et ses littérateurs. Paris, la ville journaliste par excellence, en regorge, car tout Marseillais est doublé d’un homme de lettres. Le plus sagace des historiens de la France n’était chez nous qu’un petit folliculaire, ce qui prouve d’une manière évidente, — aux yeux des Marseillais, — que notre premier journaliste venu pourrait, s’il le voulait, être un aussi fameux historien que lui. — Le plus pétillant poëte-romancier que l’Europe possède est né dans cette ville : personne ne songeait ici à le remarquer, car il se trouvait au milieu de ses pairs. — Une des gloires financières de notre époque est également marseillaise. Nous l’avons coudoyée longtemps sans y prendre garde, et cela s’entend. Dans une