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les voies de l’amour

aussi cherchait-elle à me ramener à la réalité, à m’égayer. Sa voix se faisait plus douce ; son regard devenait plus velouté, plus fascinant, et ses bras, se tendant vers moi, m’encerclaient le cou dans une étreinte amoureuse ; sa bouche cherchait mes lèvres et son haleine chaude dissipait mes rêves. Et moi détachant le nœud de ses bras, je l’éloignais quelque peu pour la contempler. Elle était alors si belle, si provoquante que, ébloui, enivré, je l’attirais à moi ; je la pressais sur mon cœur ; je la couvrais de baisers. Et puis plus rien de mon Andrée qui s’évanouissait comme un nuage que le vent dissipe. Seule Lucille était dans ma pensée comme dans mes bras. Ces pensées, ces retours vers mes années écoulées n’étaient que passagers, que fugaces. Ils ressemblaient à ces éclairs de chaleur qui brillent instantanément loin, très loin à l’horizon dans des nuages d’un gris pâle, certain beau soir d’été qui succède à un jour radieux. Ces feux du ciel nous laissent parfaitement indifférents sur leurs dangers qui sont bien éloignés, et qui ne nous empêchent pas de jouir de l’heure agréable dans une température délicieuse.

Pendant trois années, j’ai aimé Lucille d’un amour passionné, effréné. Je l’ai aimée autant qu’on peut aimer sur la terre. Elle-même me rendait amour pour amour. Il nous semblait qu’en dehors de nous-mêmes il ne pût y avoir de vie, et que la vie sans l’un et l’autre ne pouvait plus avoir d’attraits, ni de jouissances. J’aurais mieux