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les voies de l’amour

me donna la main sans effusion en me souhaitant bonne chance dans l’avenir, mais de ce ton sarcastique qui me rappelait trop le sourire que je lui avais vu plus d’une fois depuis un mois. J’en fus péniblement touché. Notre amitié s’éteignait sous le souffle de cet adieu angoissant.

« Restaient mes deux petites amoureuses que je devais quitter aussi. Que leur dire ? Que leur promettre ? Elles m’étaient presqu’aussi chères l’une que l’autre. J’avais aimé plus longtemps Lucille ; j’avais, en moins de temps, plus apprécié Béatrice. Dans mon indécision, je voulus laisser au temps l’appréciation de leurs qualités respectives. L’absence m’éclairerait aussi sur l’attachement plus sincère et la fidélité plus persistante de l’une ou de l’autre. C’était celle qui se souviendrait plus longtemps de moi que je me proposais d’épouser. Pour mettre leur sincérité, leur fidélité à l’épreuve, je promis secrètement à chacune d’elles de revenir bientôt la chercher et de l’épouser. Puis j’allai, dans mon village natal, embrasser ma mère, serrer la main à mon père. Sur les instances de ma mère, j’allai, dans une courte visite, recevoir les félicitations de ma petite amie d’enfance. Je la trouvai bien changée malgré les soins qu’elle paraissait avoir pris pour cacher la pâleur et l’amaigrissement de ses joues, et le cerne foncé autour de ses yeux au regard triste et pensif. Elle s’efforçait de paraître gaie et de sourire en me félicitant, mais sa voix tremblait sous l’émo-