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les voies de l’amour

de grandes ombres qui s’agitent en des mouvements saccadés, et si tu entends tout-à-coup, pendant cette éclaircie, les détonations d’un fusil dont les balles viennent en sifflant tomber à tes pieds et soulever la terre qui t’éclabousse ? Et que penser encore de toi, si, par hasard, d’autres nuages venant de nouveau plonger le champ des morts dans la nuit sombre, tu te sauves emportant dans tes bras tremblants le corps de la vierge dont les cheveux dénoués viennent en longues mèches s’enrouler sur tes épaules, autour de ton cou, dans ta figure ?

« Oh ! tu étais brave devant les vivants, à la lumière du jour ou à la clarté des réverbères, mais dans l’obscurité du champ des morts où l’on bute sur les tertres ou les pierres tombales, où tu aurais vu tous les cadavres, dans leur blanc suaire, sortir de leur sépulcre, où tu aurais entendu le craquement de leurs os pendant l’agitation de leurs membres, où tu aurais ouï leurs plaintes, leurs gémissements et leurs malédictions lancés comme des anathèmes contre ton vol sacrilège, qu’aurais-tu fait ? Tes cheveux auraient blanchi en une nuit, en une heure ; tu serais tombé inanimé sous le poids de ton fardeau macabre ou écrasé par le remords ; ou, si tu avais eu la force de t’enfuir, où tes jambes dans leur course furibonde t’auraient-elles conduit ? Quand, dans une cave d’autopsie, le simple glouglou produit par l’air qui