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les voies de l’amour

et il nous fallait la voir là nue sur une table de dissection souillée de toutes les impuretés ; la tête sur un bloc de bois gluant ; les cheveux épars et tombant dans des flaques de sang noirâtres ; les yeux éteints ; les mains d’un blanc nacré sur des débris informes…

« Depuis, quand je passais par hasard dans les salles du vieil hôpital, à l’heure de la clinique, il me semblait toujours voir la petite Française et le professeur Laramée, le gentilhomme le plus accompli, dont la politesse et l’urbanité sont restées proverbiales. Le docteur Laramée était plutôt grand, bien bâti. Il se tenait toujours droit et portait la tête haute. Quand il penchait le torse en avant et courbait la tête pour examiner un malade, il restait peu de temps dans cette position ; l’examen fait il se hâtait de se redresser et de rejeter la tête en arrière en lui imprimant un mouvement brusque comme s’il eût regretté de l’avoir courbée. Quand il passait d’un lit à un autre, il marchait toujours vite, se dandinant quelque peu, les bras ballants, le buste rejeté en arrière. Sous des dehors froids, Laramée était d’une affabilité exquise qu’il manifestait toujours par des paroles douces et encourageantes et des saluts gracieux qu’il prodiguait d’une manière étonnante. Comme clinicien, il avait un sens pratique qu’on retrouve rarement aussi développé chez les autres. À l’entendre, on sentait que ses cliniques étaient toujours préparées avec un soin minutieux.