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les voies de l’amour

blanc, avec beaucoup de dentelle au col et aux poignets, un boléro en velours bleu foncé bordé d’une soutache en fil d’or, des chaussettes écossaises, des souliers vernis et un bérêt en velours bleu. Ma mère fut heureuse ce jour-là, et moi, orgueilleux comme un petit paon, car j’étais le point de mire de tous les yeux éblouis des villageois et des campagnards. Et quand je fus grandelet ma mère mettait encore de la dentelle sur le devant de mes chemises. Jusque-là j’avais été la petite compagne d’Andrée avec cette amitié qu’ont les bébés pour les bébés.

« Nous grandissions, Andrée et moi, toujours ensemble, comme des compagnons, des camarades ou deux petites sœurs du même âge. Quand le pensionnat nous sépara, les mêmes sentiments de camaraderie, fortifiés par une plus franche amitié, nous unissaient encore de plus en plus. Nous avions l’un pour l’autre cet attachement qui unit inséparablement deux jeunes gens que les mêmes goûts et les mêmes études font vivre côte à côte dans une même classe de collège pendant six ou huit années. Jusque là j’avais aimé Andrée comme j’aimais Jean Roy, mon ami, d’une amitié franche qui fait frères deux cœurs éprouvant l’un pour l’autre une affection qui peut aller jusqu’au sacrifice du moi, ou qui fait sœurs deux âmes jeunes qui n’ont jamais connu d’autres.

« Tout à coup ne plus voir ma camarade, la savoir