Page:Cottin - Œuvres complètes, Ménard, 1824, tome 1.djvu/281

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je voulais te parler de son départ, qu’est-ce donc qui m’arrête ? Lorsque je veux fixer ma pensée sur ce sujet, un instinct confus le repousse ; il me semble, quand la nuit m’environne, et que le sommeil pèse sur l’univers, que peut-être ce départ aussi n’est qu’un songe… Mais je ne puis m’abuser plus long-temps ; il est trop vrai ! Frédéric est parti ; ma main glacée est restée sans mouvement dans la sienne ; mes yeux n’ont pas eu une larme à lui donner, ni ma bouche un mot à lui dire… J’ai vu sur ces lambris son ombre paraître et s’effacer pour jamais ; j’ai entendu le seuil de la porte retenir sous ses derniers pas, et le bruit de la voiture qui l’emportait se perdre peu à peu dans le vide et le néant… Mon Élise, j’ai été obligée de suspendre ma lettre ; je souffrais d’un mal singulier, c’est le seul qui me reste, j’en guérirai sans doute. J’éprouve un étouffement insupportable, les artères de mon cœur se gonflent, je n’ai plus de place pour respirer, il me faut de l’air. J’ai été dans le jardin ; déjà la fraî-